Chasse : la grippe aviaire amplifiée par les lâchers de faisans

Publié le jeu 08/12/2022 - 10:25

En Wallonie, la grippe aviaire a récemment touché plusieurs populations de faisans issues de lâchers de petits gibiers. Natagora demande aux autorités d’interdire cette pratique qui participe à l’amplification de l’épidémie et nuit aux mesures de conservation mises en place pour la préservation de la biodiversité.

Une épidémie de grippe aviaire due à une souche hautement pathogène du virus de l’influenza fait rage actuellement dans le monde entier. Ce virus, qui n’induit heureusement pas pour l’instant de conséquence sanitaire pour l’humain, impacte gravement les élevages de volailles et les oiseaux sauvages. Chaque semaine, nous arrivent des images de mortalités massives d’oiseaux dans la nature. Des décennies d’efforts de conservation sont parfois réduits à néant en quelques semaines, comme pour les pélicans ou les fous de bassan.

L’épidémie est aussi présente en Belgique. Elle s’est notamment matérialisée par des mortalités massives dans des groupes de faisans d’élevage relâchés comme gibier. Contrairement à la Flandre où cette pratique est interdite, les chasseurs en Wallonie peuvent en effet relâcher dans la nature des milliers de faisans d’élevage pour s’assurer, quelques semaines plus tard, un beau tableau de chasse. Ces lâchers sont depuis longtemps dénoncés par Natagora et la plateforme “Stop aux Dérives de la Chasse”, car, outre l’éthique douteuse de cette pratique, des impacts directs sur la biodiversité ont été démontrés. Ainsi, par exemple, des populations entières de reptiles peuvent être anéanties localement suite à la prédation par les faisans. ¹ 

Faisans de Colchide

 

Ces dernières semaines, des mortalités massives de faisans ont été constatées dans plusieurs territoires de chasse wallons : à Clavier (où des milliers de faisans ont été trouvés morts), à Frasnes-lez-Anvaing (où plus de 1000 faisans ont été ramassés sur 2000 relâchés) et à Soignies (où plus de 600 faisans ont été ramassés sur 5500 relâchés). Les autorités sanitaires ont confirmé que ces mortalités étaient dues à la grippe aviaire. Vu la chronologie entre les lâchers et la mortalité, les faisans ont probablement eux-mêmes été contaminés par des oiseaux sauvages après leur lâcher dans la nature, mais la concentration d’autant d’oiseaux non immunisés dans un même endroit est un facteur d’amplification de l’épidémie. Plusieurs carcasses de rapaces et d'autres oiseaux sauvages ont ensuite été signalées, ce qui laisse craindre une propagation à partir de ces foyers.

Après la pandémie au Covid-19 que nous venons de vivre, tout le monde comprend l’utilité des mesures de confinements. L’AFSCA a d’ailleurs décrété un confinement généralisé des élevages avicoles sur tout le territoire belge depuis le 5 octobre 2022. Il est donc incohérent de continuer à autoriser les lâchers de petits gibiers années après années dans ce contexte, puisque cela entraine des concentrations non naturelles d’individus susceptibles d’aggraver les foyers d’infection. Pour ces raisons sanitaires évidentes, tout autant que pour les impacts qu’ils ont pour la biodiversité, Natagora demande aux autorités wallonnes d’interdire cette pratique d’un autre âge, à l’instar de ce qui se fait en Flandre et aux Pays-Bas, et à tout le moins d’interdire ces lâchers aussi longtemps que l’épidémie de grippe aviaire perdure.
 

¹ Graitson & Taymans 2022 | Impacts des lâchers massifs de faisans de Colchide (Phasianus colchicus L.) sur les squamates (Reptilia Squamata)

² Actualité du Service Public de Wallonie du 6.09.2022 : Grippe aviaire : nouveaux foyers détectés en Wallonie

Photos : Olivier Colinet