Grand Hamster : la Flandre condamnée pour manquement à la protection d’une espèce menacée
Le 28 avril 2025, le Tribunal de première instance de Bruxelles a rendu un jugement important, voire historique, pour le droit de l’environnement en Belgique. Il a reconnu que la Région flamande avait manqué à ses obligations dans la protection du Grand Hamster d’Europe (Cricetus cricetus), une espèce désormais au bord de l’extinction dans notre pays.
Ce jugement établit une faute politique claire : au-delà des textes et des engagements, ne pas agir suffisamment pour protéger une espèce menacée constitue une négligence fautive. À l’heure où notre biodiversité s’effondre, cette décision crée un précédent juridique et politique majeur.
Une espèce au bord de l’extinction malgré des appels à l’action répétés
La disparition du grand Hamster préoccupe, et ce, depuis longtemps. En 2001 déjà, la Flandre adoptait un "Plan Hamster". Malheureusement, ce plan n’a jamais été suivi d’effets concrets suffisants. La majorité des mesures sont restées sur papier ou n’ont pas permis d’inverser le déclin de l’espèce.
Depuis, la Flandre enchaîne les demi-mesures pour tenter de sauver le Grand Hamster, sans jamais aller au bout des recommandations scientifiques. En 2023, alors que les associations proposent un plan d’actions clair, la Ministre de l’Environnement juge celui-ci “irréaliste”.
Devant cette impasse, Vogelbescherming Vlaanderen et Dryade introduisent un recours en justice le 27 juillet 2023. Le jugement est rendu en avril 2025.
La justice reconnaît la faute du gouvernement flamand
Dans son jugement, le tribunal rappelle que la Directive Habitats impose aux États membres une obligation de moyens, et non de résultat. Autrement dit, une autorité publique ne peut être tenue pour responsable de l’extinction d’une espèce si elle a mis en œuvre tous les moyens raisonnables à sa disposition pour l’éviter. Mais dans le cas présent, la Région flamande n’a pas rempli cette obligation de moyens.
En clair, le gouvernement flamand n’a pas rien fait — il a trop peu fait, trop tard, et ce malgré les alertes répétées des scientifiques et des associations. Adopter des plans qui ne sont pas à la hauteur constitue une faute.
Réparations en nature pour le hamster
Une fois cette faute établie, le tribunal condamne la Région flamande à une réparation en nature : le gouvernement doit corriger le tir en adoptant des mesures de restauration concrètes et suffisantes. C’est le pendant de la réparation par équivalent, qui consiste à indemniser les victimes.
Bien sûr, le juge ne peut pas définir lui-même les mesures précises à mettre en œuvre — ce rôle revient au gouvernement. Mais il affirme clairement que la Région est tenue de faire tout ce qui est raisonnablement nécessaire pour rétablir une situation de conservation du hamster favorable, conformément à la Directive Habitats.
En quoi cette décision peut être qualifiée d’historique ?
C’est la première fois en Belgique qu’un gouvernement est condamné pour ses manquements dans la protection d’une espère. Ce jugement envoie un message fort : un gouvernement qui ne met pas en places les mesures adéquates peut être sanctionné. Il établit que les obligations environnementales ne sont pas symboliques. Elles engagent juridiquement. Elles doivent être respectées. Et si ce n’est pas le cas, la justice peut intervenir pour rappeler les gouvernements à leurs responsabilités.
Il rappelle aussi que la restauration de la biodiversité ne peut pas reposer sur le bon vouloir, ni sur des mesures volontairement faibles. Protéger une espèce en danger suppose des des arbitrages clairs, des moyens mobilisés, et la mise en place de mesures contraignantes.
Ici, ces choix n’ont pas été faits. La conséquence est tragique : la disparition presque totale du Grand Hamster d’Europe sur notre territoire. Et dans cette disparition, le gouvernement flamand a commis une faute.